Et sur toi, y'a écrit quoi ?

Brèves de pancartes, corps et âmes et salade grecque

It Paris
4 min ⋅ 13/03/2025

- Y’a écrit quoi sur toi ?
- “Juives fières, républicaines et en colère”
- Ah ok. Et c’est quoi le rapport avec la lutte féministe ?
- Ben, dans mon groupe, elles voulaient rappeler le sort des Israéliennes violées, tuées, kidnappées et oubliées. Et aussi la petite fille qui a été violée à Courbevoie. D’ailleurs, j’ai beaucoup de copines qui portaient des messages en ce sens. Et toi, y’a marqué quoi ?
- Un truc du genre “Féministes, queers, anticolonialistes, anti-impérialistes.”
- Dacc… Je ne vois pas trop le rapport avec l’égalité des droits et les violences faites aux femmes. Et toi, la Violette ?
- Moi y’a écrit “Mon corps, ma vie, mes choix.”
- Ah ben, c’est pas mal ça ! Et pourquoi on n’a pas toutes manifesté ensemble, du coup ?
- Ben, chez moi, elles ont dit “On arrête les fascistes et les sionistes” parce qu’elles véhiculent des “haines racistes, colonialistes et LGBTphobes”.
- Ah ouais ?? Ça alors. Dans mon groupe, j’avais pas l’impression que c’était le propos. Y’avait pas mal d’élus de gauche en plus. Et aussi des foulards arc-en-ciel. En tout cas, j’ai défilé toute seule avec trois heures de retard, et entourée de flics. Tu vois pas l’universalisme. 
- Oh t’as pas eu de bol. Nous on est parties assez vite, et puis on a ralenti, paraît qu’il fallait empêcher des pancartes de défiler.
- Ben oui, c’est ce que je te dis, grosse nouille. C’est moi la pancarte que t’as bloquée.
- Ah zut ? T’es très sympa pourtant. Et t’as pas l’air fasciste, ni homophobe. On aurait pu défiler ensemble franchement. On est toutes d’accord que les femmes, elles sont quand même vraiment dans la merde dans une bonne partie du monde.
- Moi, j’ai une cousine qui habite à New York et lundi elle défilait en jaune avec le texte “For an anti-imperialist struggle - Until Palestine is free from the river to the sea”.
- C’est chaud quand même. T’as vu comment ça nous a séparées ? Avant on était copines. Tu veux pas qu’on s’inscrive au Salon de l’agriculture l’année prochaine ?
- Je vais déposer ma candidature, mais l’année dernière j’avais “Plus de meufs, moins de keufs.” Ça fait un peu tache dans le CV…
- T’as qu’à leur dire qu’à la prochaine tu prendras “Salam Shalom Peace”, ça ça l’fait grave.



Coup de blues radiophonique

Ce matin, à la radio, gros sujet : matinales spéciales “nouvel ordre mondial”.
Sur France Inter, dans le studio 104, en direct et en public, on a Mélanchon et Villepin.
Sur Europe 1, pendant une longue demi-heure, c’est Marine le Pen.
Drôles de choix pour discuter sereinement et de façon constructive de l’avenir des relations internationales.



Corps et âmes

Une nouvelle thématique pour un nouvel accrochage à la Bourse de Commerce.
Le titre, très générique, n’en dit pas forcément plus sur le choix des œuvres exposées, tant le corps et l’âme ont inspiré - et inspirent toujours - de nombreux artistes.
C’est l’artiste noir américain Arthur Jafa, qui occupe la Rotonde, le Studio et la Galerie 2. Sur les immenses écrans, ses films-zapping explorent l’histoire et à la culture noires américaines, des prédicateurs à Obama, en passant par le mouvement Black Lives Matter, James Brown, et les innombrables musiciens, sportifs, hommes d’État qui ont façonné l’histoire de cette communauté.
Dans un tout autre genre, son film hypnotique AGHDRA met en scène un océan de pierres noires qui ondulent et s’agitent au son d’une playlist sonore. Métaphore de l’aveuglement et du chaos, c’est une vidéo enveloppante et saisissante.
Évidemment, on citera les huit immenses toiles de Georg Baselitz, qui clôturent l’exposition des galeries supérieures. Majestueuses et intimidantes. Et son “grand” petit garçon en bois qui nous accueille à l’entrée du musée.
Les sculptures hyperréalistes de Duane Hanson, fascinantes.
Les silhouettes apaisantes de Miriam Cahn, ou celle, déchirante, de Mira Schor.
Les vidéos d’Ana Mendieta, les peintures de Lynette Yiadom-Boakye, les portraits d’Avedon ou ceux de Marlene Dumas, confirment l’ampleur, la diversité et l’engagement de la collection Pinault.
L’exposition aurait d’ailleurs pu s’appeler Accrochage, qu’elle n’en aurait pas été moins dense ni moins remarquable.
Les œuvres d’Ali Cherri ornent les vitrines et on y lit cette petite phrase : “Tu crois que c’est si simple de se débarrasser d’une blessure ?” Non, pas vraiment. Et “Les miroirs feraient bien de réfléchir avant de renvoyer les images.” Pas faux.

Corps et âmes
Bourse de Commerce

Jusqu’au 25 août 2025



Temple grec

Il paraît que mes recommandations de restaurants tournent toujours autour des mêmes adresses. Ce qui est faux, bien sûr. La semaine dernière, je vous parlais d’un petit bar-resto-bobo de quartier, Lissit, et la semaine précédente, je testais le renouveau d’Au Trou Gascon à Daumesnil.
Cette semaine, dépaysement hellénique.
Que dis-je, c’est un resto, un traiteur, une épicerie ? … C’est un mix des trois !
Ypseli, qui transforme la rue Réaumur en nouvelle Athènes, voit les choses en très grand.
Côté traiteur et épicerie, c’est la caverne de Zorba : plats mijotés, condiments, miel, huiles d’olives, poteries, pâtisseries, vins, fromages, t-shirts, livres de recettes…
Côté resto, on reviste la cuisine de Yaya, réinterprétée par Fragiskos Dandoulakis, chef d’une cuisine grande comme un paquebot vert d’eau.
Derrière ce temple grec, deux amoureux, Symeon Kamsizoglou et Delphine Pique, Grecs d’origine, de cœur et surtout de ventre.
Le midi, un semainier fait le tour des plats emblématiques du pays des Hellènes (pastitsada et boureki pour nous), et le soir la carte s’étoffe de poulpe, crudo, spanakopita, joue de bœuf et gigot d’agneau.
Si vous rêvez de murs blancs à la chaux, de suspensions en osier et de poissons bleus, prenez un billet pour Amorgos. Chez Ypseli, on est dans du grec new-yorkais, citadin et pimpant.
Une machine ultra prometteuse en passe d’atteindre sa vitesse de croisière. Une épicerie-traiteur bourrée de trésors.

Ypseli
88
rue Réaumur Paris 2e
Fermé dimanche et lundi






It Paris

Par Karine Salomon

- Bonjour, c'est pour un bilan de compétences.
- Parfait. Dîtes m'en un peu plus sur vous.
- J'aime manger, beaucoup. Et j'aime le bon vin.
- Très bien. Et ?
- J'aime beaucoup aller voir des expos et je m'y connais un peu.
- Ah c'est pas mal ça.
- On me dit que j'écris bien et que j'ai pas mal d'humour.
- Bon, ça peut servir.
- J'aime raconter, expliquer, vulgariser, faire saliver. Et rebondir sur l'actualité.
- Très bien. Alors, si je résume, vous êtes une rédactrice, gourmande, férue d'art, avec un talent certain pour le récit et les bons mots. Vous devriez écrire une newsletter.