Submersion

Un sentiment, un chef heureux, une odeur de chocolat.

It Paris
3 min ⋅ 31/01/2025

Submersion, nom féminin (du latin submersio) : action de submerger ; fait d'être submergé.
Submerger, verbe transitif (du latin submergere) : être envahi par un sentiment ou une sensation ; envahir une personne ou un groupe, en lui imposer la force supérieure du nombre ; mettre quelqu'un dans une situation où il ne peut plus faire face.

A y regarder de plus près, cette submersion, qui a été le centre de toutes les conversations et de toutes les polémiques ces derniers jours - certains estimant que le terme était outrancier et exagéré, les autres applaudissant des deux mains une position courageuse - nous en connaissons quotidiennement les effets, à moins d’être dénué de sentiment et de conviction.

A titre personnel, je suis submergée d’émotion chaque semaine à la pensée des otages libérés et submergée de tristesse en sachant que demain, un père sera délivré sans ses enfants.
Submergée de dégoût face aux mises en scène grotesques du Hamas, et submergée de terreur en voyant une jeune femme de 19 ans, captive depuis 480 jours, se frayer un passage parmi une foule massive venue crier sa haine, devant un Hezbollah dépassé.
Submergée d’espérance et de désillusion face à l’espoir d’une suite pacifiée d’un conflit lui-même submergé de convictions religieuses et de politiques hostiles.
Submergée de colère par l’incompréhensible violence quotidienne qui se banalise et ne cesse de rajeunir.
Submergée de peur alors que 67 personnes sont tombées dans un lac glacé.
Submergée d’impuissance en voyant la conscience de la Shoah disparaître peu à peu.
Submergée de lassitude lorsqu’on mésemploie le mot submersion, en négligeant l’intégration, l’adaptation, et l’enthousiasme citoyen.

Mais je suis aussi submergée de béatitude quand le soleil pointe son nez, lorsque les flocons tombent, lorsque les bourgeons vert tendre renaissent. Submergée de plaisir à la lecture d’un menu, à la dégustation d’une bière fraiche, à la contemplation d’une œuvre d’art.
Et submergée de reconnaissance en vous sachant si fidèles à me lire.

Si j’avais cru que j’aurais un jour le monde dans ma poche.
Si j’avais cru que j’y regarderais la télévision, que j’y rencontrerais des gens, que j’y partagerais mes envies et mes découvertes. Que je serais happée par l’étendue de ses possibilités et désespérée par la profondeur de l’agressivité qu’on y trouve.
Si j’avais cru qu’un jour un jeune adolescent de 14 ans serait poignardé pour n’avoir pas voulu s’en défaire et que deux adolescents, à peine plus âgés, l’auraient tué pour s’en emparer.



Submergée d’Esu


Le chef d’origine coréenne Esu Lee - anciennement à la tête du restaurant Cam, parti “covider” à LA avant de revenir - prend ses marques dans son nouveau petit repaire, JIP, au son d’une play-list dont on apprécie très vite la qualité. Et si l’on a la chance de s’asseoir en face de sa petite cuisine, on allie plaisir des papilles et de la papote.
Il est si charmant, Esu. Il parle de Paris comme personne, et on se prend à aimer de nouveau cette ville acerbe. Il est poétique quand il prononce “beranaise” et touchant quand il raconte son parcours.
Il est surtout déterminé à reconquérir la capitale avec un menu tenu (35 €) comprenant deux petites entrées (sashimi ou tofu - mandoo ou crevettes Madame Butterfly) et un bol fumant de noodles.
En ce moment, c’est Black pepper (sauce au poivre, bouillon de poulet) ou Tteokbokki (sauce coréenne fermentée, crème de parmesan), mais ça peut - et va - changer. Quand ? “With the season, or when I feel like it”, précise Esu en souriant.
Quelques petites assiettes sont disponibles en complément, comme cette étonnante salade de filaments de pommes de terre sautées au céleri, délicate. Et en dessert, une salade de fruits, tapioca, sorbet mandarine, rafraîchissante.
C’est archi plein - Esu oblige - mais il reste souvent quelques places à 18h30.
A l’heure américaine.


JIP
JIP, “foyer / maison” en coréen, est le nouveau resto de David Israël et Jonathan Gainville (déjà derrière le très réussi
Double, Paris 18e), associés à Esu Lee.
112 rue de la Roquette Paris 11 - fermé dimanche et lundi



Submergée de Plaq

Ça embaume enfin le chocolat rue du Cherche-Midi où Plaq vient d’ouvrir sa seconde manufacture.
Évidemment, on va me taxer de favoritisme, mais que voulez-vous, j’ai deux amours chocolatés : l’un pour Gilles Cresno, mon remontant quotidien, l’autre pour Plaq, ma claque chocolatière, mon shoot papillaire. Un chocolat acidulé et brut, des pralinés puissants, des rochers opulents, des gâteaux fondants, un chocolat chaud caressant, des proprios charmants, un packaging épatant.
On me glisse à l’oreille que les bouchées de Carrés Sauvages valent également la damnation... Je ne tarderai pas à m’y plonger…


Plaq - 4 rue du Nil, Paris 2 & 57 rue du Cherche-Midi, Paris 6
Gilles Cresno - 63 rue Gallieni, Rueil-Malmaison
Carrés Sauvages




It Paris

Par Karine Salomon

- Bonjour, c'est pour un bilan de compétences.
- Parfait. Dîtes m'en un peu plus sur vous.
- J'aime manger, beaucoup. Et j'aime le bon vin.
- Très bien. Et ?
- J'aime beaucoup aller voir des expos et je m'y connais un peu.
- Ah c'est pas mal ça.
- On me dit que j'écris bien et que j'ai pas mal d'humour.
- Bon, ça peut servir.
- J'aime raconter, expliquer, vulgariser, faire saliver. Et rebondir sur l'actualité.
- Très bien. Alors, si je résume, vous êtes une rédactrice, gourmande, férue d'art, avec un talent certain pour le récit et les bons mots. Vous devriez écrire une newsletter.