Osons tout

On ose le complot. L'expo et le resto pas parisiens.

It Paris
4 min ⋅ 11/09/2025

Des têtes de cochon ont été retrouvées sur le seuil de plusieurs mosquées. Un acte révoltant, attribué à des suspects originaires de Serbie. Après avoir utilisé “une ligne de téléphone croate”, ils auraient quitté le territoire par la Belgique. Un modèle de coopération européenne efficace.
Une nouvelle ingérence étrangère, qui n’en est pas à son coup d’essai. Les étoiles de David bleues, découvertes sur les murs de Paris, auraient été taguées par quatre moldaves proches du réseau de propagande prorusse Doppelgänger. Les mains rouges sur le Mémorial de la Shoah ? Elles auraient été commanditées par un groupe bulgare missionné par la Russie.
De là à imaginer que le déferlement mondial de haine anti-israélienne et anti-juive - qu’il faut distinguer du rejet du gouvernement Netanyahu, tout à fait entendable - soit alimenté par des puissances malveillantes et organisées, il n’y a qu’un pas, qu’il m’est de moins en moins difficile de franchir.
Mais puisque cette semaine, on ose tout, soyons “complopatible”.

Il y a quelques mois, comme certains d’entre vous peut-être, j’ai regardé La Fièvre. Et si la série pêche un peu, j’y ai découvert la fenêtre d’Overton, ou comment accepter l’inacceptable. Le mécanisme est simple : supprimer les tabous, relativiser l’inconcevable, traiter ceux qui s’y opposent d’extrémistes ou de fascistes, puis faire passer pour “raisonnable” une idée ou une pratique impensable.
Or, si la fenêtre de Joseph Overton a été légitimement étendue dans le passé - en faveur, par exemple, du vote des femmes, ou de l’IVG -, il est d’une toute autre nature de déchirer l’affiche d’un petit otage roux, de huer des sportifs, de déprogrammer des artistes ou stigmatiser des communautés.

Un enchaînement naturel et insidieux qui répand son poison médisant et accusateur. Qui insulte, calomnie et provoque. Qui sème dans nos démocraties désordre, ressentiment et zizanie.
Alors que l’Europe vient d’être touchée par quelques drones russes « égarés », que 53% des 15-30 ans s’informent uniquement sur les réseaux sociaux, et que Lecornu a la mine des mauvais jours, osons exprimer quelques craintes quant aux mouvements de la fenêtre.


Les raisons pour y aller

A Deauville-Trouville, en plus de Pamela Anderson, - dont le nom figure désormais sur les célèbres Planches -, il faut aller voir une formidable exposition, dans un lieu qui ne l’est pas moins.

Aux Franciscaines, Jean de Loisy* a imaginé une exposition consacrée aux profondeurs de l’océan.
Géniale dans sa forme - pénombre, murs bleu nuit, cartels irisés multicolores - elle l’est surtout dans sa proposition, qui mêle les genres et les époques.
On y découvre pêle-mêle, ou plutôt mer-belle, des vidéos et œuvres contemporaines, des films anciens, des sculptures, des dessins scientifiques, des “merbiers” de poissons séchés, des trésors, des maquettes…
Construit autour de sept thématiques, de l’estran (cette bande côtière alternativement recouverte et découverte par la marée), aux naufrages, en passant par la faune, la flore et les abysses, c’est une balade en apnée, enthousiasmante, insolite, et souvent instructive.
Coup de foudre absolu pour la main d’Émile Gallé - dont le soutien à Dreyfus ne me le rend que plus cher - pour les dessins d’Ernst Haeckel, pour les photos de Jean Painlevé.
Une exposition qui n’a pas à rougir face aux comparaisons parisiennes, et qui, de toute façon ne peut pas rougir : elle est entièrement bleue.

Bleu Profond - L’océan révélé
Jusqu’au 21 septembre aux Franciscaines à Deauville

*Jean de Loisy est commissaire d’exposition indépendant. Il a été président du Palais de Tokyo, conservateur à la Fondation Cartier, au Musée national d’art moderne, et directeur des Beaux-Arts. Il est depuis avril 2025 directeur artistique de la Fondation van Gogh à Arles.


Un ex Top Chef tout tatoué qui s’installe dans une ruelle de Trouville ?
À l’abri des regards et des influenceurs, Jarvis Scott a ouvert son Turbulent. Qui, il faut bien le dire, turbule.
Au menu : de l’amer, du piquant, des abats, du cru, du terre-mer… Mais le chef sait s’adapter en cas d’allergie, de restrictions, ou même d’hésitation ! Surtout, ça change des moules marinières et de l’escalope normande, trop souvent bâclées dans les restos “de groupe” qui ont malheureusement conquis l’espace deauvillais.
Un engagement de qualité des produits et d’originalité des goûts qui mérite d’être salué et plébiscité.
Et puis en dessert, la Danette chocolat-noisette vient tout adoucir.

Turbulent
1 rue Durand Couyère, 14360 Trouville-sur-Mer
Fermé lundi et mardi


Mon premier est un bouillon, mon deuxième une pizza napolitaine.
Entre le Bouillon Morny et Napoletano, mon cœur balance.
Pour ne pas faire de jaloux, c’est entrecôte le vendredi et Regina le samedi.
Quand on aime, on double.


On prolonge la pèche

C’est un resto marin que je n’avais pas testé, d’une ex-Top Chef, dont, très honnêtement, je ne me souviens plus. Inès Trontin et Corto Brayer ont ouvert Pêche il y a déjà plusieurs mois et, comme son nom l’indique, c’est plutôt poisson.
Ce soir-là, il y a du poulpe, braisé et snacké, et du maquereau grillé à la flamme. Bon point pour les produits, évidemment bien sourcés. En entrée, une petite nage de moules et coques à l’orange, qui aurait mérité d’être un poil plus généreuse.
La carte est courte et les prix sont sympas, même le soir : EPD 45€.
Pour moi qui suis très dessert, il n’y en a qu’un : un tiramisu glacé. Pas de bol, car en ce moment c’est une tarte framboises, crème d’amande et ganache chocolat blanc.
Y retournerais-je (plagiat) ? Si je suis dans le quartier.

Pêche
127 rue Cardinet Paris 17
fermé samedi et dimanche


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It Paris

Par Karine Salomon

- Bonjour, c'est pour un bilan de compétences.
- Parfait. Dîtes m'en un peu plus sur vous.
- J'aime manger, beaucoup. Et j'aime le bon vin.
- Très bien. Et ?
- J'aime beaucoup aller voir des expos et je m'y connais un peu.
- Ah c'est pas mal ça.
- On me dit que j'écris bien et que j'ai pas mal d'humour.
- Bon, ça peut servir.
- J'aime raconter, expliquer, vulgariser, faire saliver. Et rebondir sur l'actualité.
- Très bien. Alors, si je résume, vous êtes une rédactrice, gourmande, férue d'art, avec un talent certain pour le récit et les bons mots. Vous devriez écrire une newsletter.