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Par Karine Salomon
3 mai · 4 mn à lire
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Dangereux égarement

Ou comment se tromper lourdement de combat et de manière


Le mauvais combat

Nous ne le répéterons jamais assez, à l’heure où des scènes inimaginables d’égarements imbéciles et de violentes ignorances nous parviennent des campus américains et de Sciences Po.

Il est évidemment possible et permis de manifester pour l’arrêt de la guerre entre Israël et le Hamas, et il est parfaitement possible et permis d’espérer la création d’un État palestinien libre et démocratique, et il est tout à fait possible et permis de critiquer la politique israélienne.

EN REVANCHE, il est absolument abject et condamnable de ne pas rappeler le sort des 134 otages retenus par le Hamas depuis 208 jours et en exiger la libération immédiate et sans condition.
Abject et condamnable de crier à la disparition d’Israël et de hurler sa haine des Juifs au son “d’état sioniste fasciste”, de “brick by brick, wall by wall, Israel will fall” et de “we don’t want no two states, we’ll take all of it”.
Abject, condamnable et dangereux de prôner une “intifada mondiale”, d’espérer de nouveaux 7 octobre, de se peindre les mains en rouge sang en faisant croire qu’on n’en connaît pas la signification - ou si on ne la connaît vraiment pas, de se prétendre élève de Sciences Po…

Peux-tu détester à ce point ta liberté de penser, de parler, de faire l’amour, pour soutenir aveuglément les dictatures meurtrières, homophobes, misogynes et anti-jeunesse des gouvernements et des mouvements islamistes ?

Es-tu à ce point noyé dans ta protestation d’adolescent thunbergien, opposé à la mondialisation, obsédé par la racisation de la société, anti-occidentaliste, pour confondre tes combats avec autant d’ignorance ?

Quel courage démontres-tu en manifestant rue Saint Guillaume et 116th St & Broadway quand un rappeur iranien à peine plus âgé que toi, Toomaj Salehi, est condamné à mort par un tribunal islamiste d'Ispahan ? T’es-tu seulement soucié de son combat ? Lui qui se bat pour être aussi libre que toi.

Et quand tu répètes, en arabe, des slogans qui poussent au Djihad et qui glorifient les martyrs, te rends tu compte qu’une de tes tours peut encore se casser la gueule ? Et que lâche comme tu es, tu seras sans doute bien au chaud à boire ton hot coco en regardant Al Jazeera.

Tu penses sans doute que ton combat est indépendant et que tu n’es pas manipulé.
Les Insoumis en venant te soutenir le pensent naïvement aussi.
Certains pourtant se frottent les mains de tout ce bordel et de toute cette escalade de polarisation et de détestation. A la tête des marionnettistes ? Le guide suprême de l’islamisme politique mondial, l’ayatollah Khamenei himself. Et lorsqu’il aura décidé que c’est le bon moment, ce n’est pas d’un keffieh qu’il couvrira les cheveux des jeunes femmes.

Reste à espérer que tu ne représentes encore qu’une minorité. Alors, aux étudiants silencieux et aux citoyens concernés, faites entendre vos voix et votez aux élections européennes qui approchent.
Only one solution, democratic participation.


A vos bulletins

Le Parlement européen est l’institution la plus démocratique de l’Union européenne, les eurodéputés étant élus au suffrage universel des 27 pays de l’UE. C’est d’ailleurs l’unique élection à la proportionnelle en France.
Peu puissant lors de sa création en 1958, il a peu à peu gagné en influence et détient aujourd’hui un pouvoir législatif avec le Conseil de l’Union européenne, un pouvoir de contrôle, notamment budgétaire, et un pouvoir politique particulièrement sur la scène internationale.

705 eurodéputés siègent au Parlement européen, mais après les prochaines élections de juin 2024, ils seront 720, soit 15 de plus. La France passant de 79 à 81 députés. 

Sept forces politiques y sont représentées.
La première avec 25% des députés est le Parti populaire européen (PPE) ou chrétiens-démocrates, parti de droite conservatrice.
Au centre-gauche, le groupe Alliance Progressiste des Socialistes et Démocrates (S&D) représente plus de 20 % des sièges.
Cette opposition droite-gauche républicaine est suivie de près par Renew, nouvelle formation centriste créée le 12 juin 2019. Ses 101 élus représentent plus de 14 % des eurodéputés.
A l’extrême droite, les nationalistes Identité et Démocratie rassemblent tout de même 10 % des sièges avec 62 eurodéputés issus de 8 pays, dont principalement l’Italie et la France.
La gauche radicale ne peut se targuer que de 37 députés issus de 13 états membres. La délégation française étant la plus importante avec 6 députés.
Un assez gros contingent Vert et un parti de Non-inscrits complètent ce tableau.

L’élection européenne n’est pas une élection nationale, malgré toutes les conclusions qu’on ne manquera pas d’en tirer le soir du 9 juin prochain.
Il s’agit pour nous de choisir les voies et les voix de l’Europe de demain, sa position et son influence en matière de défense, d’énergie, d’économie, d’agriculture, d’immigration… Et dans un monde bousculé et belliciste, les enjeux sont énormes.
Et si nombre d’européens sont tentés par les extrêmes, par ras-le-bol, colère ou peur, essayons de ne pas oublier que les vents très à droite et très à gauche n’ont jamais rien annoncé de très joyeux dans le passé.


L’Arpaon

Un petit resto comme on les aime, peu de couverts, cuisine visible, tables et chaises façon bistrot et de la recup en guise de vases à tulipe.
On a eu un peu de mal à dégoter deux couverts sur les 20 que compte la salle, ce qui nous a permis d’échanger fréquemment avec Yann (Derout) qui s’occupe de la salle.
Premier constat, ce gars-là est hyper hyper gentil…
Et à croire la parole d’une mère qui regarde avec tendresse son fils s’agiter aux fourneaux, les deux chefs Yann et Nathan (respectivement passés par le Servan et Candide), “ont trouvé l’osmose entre leurs deux cuisines” en “s’inspirant de leurs origines multiples et de leurs talents complémentaires”.
Une amicale complicité qui va rythmer ce joli moment de bistronomie.

On ne pouvait passer à côté du fricassé tunisien (même si on est plutôt pied de veau), dont la brioche toute légère se garnie de thon, de harissa, de piment et câpres. Délicieuse petite bouchée, qui nous a laissé suffisamment d’huile sur les doigts pour passer l’examen de Mme Zana.
Ont suivi les trois entrées, tartare de bœuf relevé à la chili oil (adoré), brochettes de langoustine tièdes, juste snackées, à déposer dans sa feuille de salade façon rouleau de printemps, mayo à l’amba (condiment à la mangue verte fermentée), sel fumé (adoré), ravioles d’artichaut au très bon goût de beurre blanc (adoré).
En plat, le tajine de veau pruneaux et amandes est servi façon vol-au-vent, et si on peut se demander ce qu’apporte l’emballage de pâte feuilletée à ce ragoût d’inspiration marocaine, une fois la pâte noyée dans le reste de sauce, on comprend mieux.
Un mini affogato, glace noisette et chantilly clôt un dîner qui nous a fait sourire tout le long.
Les généreux verres de vins natures, bien sélectionnés et servis par Yann, ont probablement aidé nos zygomatiques à se détendre. Et ils en ont bien besoin.

Il a fallu filer sans le tigré cacahuète caramel, déjà dehors le deuxième service s’impatiente sous la flotte du mois de mai.
On s’est promis de revenir.

L’Arpaon
Du Mardi au Samedi 19h00 - 22h30
Carte 45-50€

A la question pourquoi Arpaon, la réponse est historique.
Louis-Joseph de Saint-Véran, dit Marquis de Montcalm (dont la rue porte le nom), est un gentilhomme et militaire français, né à Candiac dans le sud du Royaume. À la mort de son père en 1735, il hérite des seigneuries de Saint-Veran, Candiac, Tournemine, Vestric, Saint-Julien et…d’Arpaon.


Giacometti / Sugimoto

En 2013, le MoMA de New York propose à Hiroshi Sugimoto, architecte et photographe japonais né en 1948 à Tokyo, de photographier son jardin de sculptures. Cette commande prendra la forme d’une série de photographies au flou adouci, Past Presence.
Dans le jardin du musée américain, Sugimoto est d’emblée attiré par la Grande Femme de Giacometti “comme si toute la chair avait été grattée sur un corps humain”.
Photographiée en plein jour et au crépuscule, la silhouette décharnée rappelle à Sugimoto les protagonistes du théâtre Nô qui évoquent en deux actes, les âmes mortes qui reviennent à la vie.

Dans l’écrin magnifique de l’Institut Giacometti, la commissaire Françoise Cohen donne vie au théâtre Nô de Sugimoto, les grandes silhouettes du sculpteur prenant leurs rôles sur une scène imaginaire.

Une exposition d’une grande délicatesse qui met en valeur le minimalisme expressif de l’art ancestral japonais, l’expressionnisme des longs profils du sculpteur suisse, l’élégance poudrée des images du photographe.
Un instant de beauté hors du tumulte.

Giacometti / Sugimoto : En scène
Institut Giacometti (et pas Fondation)
Jusqu’au 23 juin 2024